Ce cadeau de Noël empoisonné a été offert aux neuf employées des succursales de La Praille et de Crissier de la chaîne de mode Pimkie. Leur licenciement a été annoncé en milieu d’après-midi d’un jour de travail et les magasins ont fermé leurs portes dans la foulée. L’entreprise avait caché sa mise en faillite plusieurs jours, tant à ses employées qu’aux gérants des centres commerciaux où elle opérait.
Réunies en conférence de presse le 23 décembre aux côtés du syndicat Syna qui les défend, trois ex-employées ont manifesté leur colère face au mépris de l’entreprise, qui est propriété de la famille Mulliez, sixième fortune de France en 2020 à hauteur de 26 milliards d’euros.
Le Syndicat Syna nous informe que ce sont finalement les employés français des relations humaines du groupe qui ont repris tant bien que mal le dossier en main: «Il a fallu batailler deux semaines pour recevoir les documents nécessaires pour l’obtention du droit au chômage», dit Fabrice Chaperon, responsable chez Syna. «L’entreprise a caché la faillite aux employées dans le but d’économiser de l’argent. L’ardoise est laissée à la collectivité. Ce sont nos impôts qui vont payer le salaire dû par l’entreprise pour le mois de décembre», ajoute-t-il.
A ce jeu-là, le groupe n’en est pas à son coup d’essai. Au printemps 2021, la branche belge de Pimkie se déclare en faillite avant de rouvrir durant l’été sous forme franchisée, laissant la facture des salaires impayés au contribuable belge. Les 136 employés laissés sur le carreau ont été scandalisés de voir circuler sur les réseaux sociaux de la chaîne des offres d’emploi pour leur ancien poste alors qu’ils attendaient encore le versement de leur dernier salaire et indemnités, comme l’a révélé la chaîne belge RTL Info. Les syndicats belges quant à eux accusent ainsi le groupe Mulliez d’avoir caché un plan de restructuration derrière cette prétendue faillite.
Début 2018, l’entreprise a sauté sur l’occasion de la nouvelle Loi Travail française pour licencier plus de 200 personnes selon de nouvelles dispositions qui évitaient le paiement de plans sociaux complets, comme le permettait cette nouvelle loi tout juste entrée en vigueur.
Pour le groupe Mulliez, toute économie est bonne à prendre, y compris lorsqu’elle implique un mépris du personnel et le transfert du coût de sa mauvaise gestion au contribuable. A travers ces pratiques rendues faciles grâce à un droit suisse très souple en la matière, mais également via les services de cabinets de conseils et d’avocats fiscalistes préconisant ces méthodes, se dessine un système de «voyoucratie patronale transfrontalière» comme le décrit le syndicat Syna dans ses communiqués. Fabrice Chaperon déclare que le syndicat continuera le combat pour obtenir des réparations à travers une lettre au Conseil d’Etat et des actions symboliques devant la résidence de l’un des propriétaires du groupe, qui se situe dans le Canton de Genève.