Régulièrement on me rappelle que je suis très minoritaire et que notre système démocratique permet une participation populaire et que je dois accepter les règles. Et c’est vrai que j’ai l’habitude, dans ma vie parlementaire, de proposer par motions ou postulats des changements qui sont refusés. Cela ne m’a pas dissuadé et depuis maintenant près de 18 ans, je continue à me battre pour plus de solidarité, plus d’attention à l’autre, pour préserver la biodiversité et lutter au niveau local ou régional contre le réchauffement climatique. Parfois, je vois une petite percée et cela me motive à continuer. Même si souvent franchement je désespère devant l’aveuglement des autorités face aux dérèglements climatiques et les crises humanitaires.
Mais aujourd’hui, ma colère est grande parce que j’estime que le Conseil fédéral bafoue la volonté populaire. Je veux parler de l’ordonnance fédérale qui entrera en vigueur le mois prochain pour l’application du contre-projet à l’initiative pour des multinationales responsables. Cette dernière fut acceptée de justesse par une majorité en votation. Mais elle a échoué à cause du refus d’une majorité des cantons.
La droite et les lobbies des multinationales ont usé de méthodes pas très démocratiques pour défendre leurs privilèges. Ceci en accusant fortement les ONG actives dans l’aide au développement ou les Eglises de se mêler de politique alors que ce ne serait pas leur rôle. Et le Conseil fédéral leur donne aujourd’hui raison. L’ordonnance d’application à ce contre-projet adoptée récemment contient tellement de dérogations que presque toutes les multinationales pourront au final se soustraire aux dispositions prévues par la loi.
Les entreprises seront notamment exemptées d’appliquer la loi si la fabrication finale de leur produit a lieu dans un pays où le risque de travail des enfants est faible. Cela alors qu’il est de notoriété publique que le travail des enfants se situe souvent plus bas dans la chaîne d’approvisionnement, comme le rappelaient encore différentes ONG cette semaine.
L’esprit de l’initiative est totalement bafoué, et l’ordonnance est un pur alibi. Glencore va continuer à extraire du cuivre en RDC en toute tranquillité et sans devoir rendre de compte. Ou Nestlé assécher des nappes phréatiques pour vendre de l’eau en bouteille sans se soucier des dommages environnementaux.
La droite dure a gagné. Pas l’ombre d’une remise en question ni au parlement ni au Conseil fédéral. C’est vraiment ça la démocratie?