La semaine dernière, le Ministère public a finalement bouclé son enquête concernant l’incendie qui avait touché le foyer des Tattes à Vernier le 16 novembre 2014. Il avait fait un mort et 43 blessés. Au final, il inculpe deux requérants d’asile et autant d’agents de sécurité devant le Tribunal de police. Mais renonce à poursuivre l’État ou l’Hospice général en charge de la gestion de la structure. L’occupant de la chambre dans laquelle le sinistre s’est déclenché est ainsi poursuivi pour incendie par négligence ainsi qu’homicide et lésions corporelles. Un autre requérant d’asile est mis en cause pour ne pas avoir porté secours à des victimes.
Pour l’association Solidarité Tattes, l’enquête est plus que contestable.«Ces deux requérants fumaient et cuisinaient dans leur chambre. Mais où pouvaient-ils donc fumer, dans quels lieux réservés mais accueillants auraient-ils pu se rencontrer dans un centre qui était bourré à craquer et qui hébergeait au moins deux fois plus de personnes que «la normale»? Mais où pouvaient-ils donc cuisiner alors que les gens étaient entassés non seulement dans les chambres mais aussi dans les cuisines et devant les WC aux portes improbables? Certaines familles, de retour à domicile à la sortie de la Maternité, avec un nouveau-né dans les bras, utilisaient même les plaques électriques… pour se chauffer en plein hiver!», rappelle-t-elle dans un communiqué.
Quid des gardiens? Selon l’acte d’accusation révélé par la TdG, les agents dans le bâtiment ont essayé à plusieurs reprises d’éteindre l’incendie avec des extincteurs, appeler les pompiers. Mais en ouvrant une porte, ils ont fait un appel d’air funeste. Pour l’acte d’accusation, ils auraient dû immédiatement évacuer les résidents. «Que faire, comment faire dans un centre tellement brinquebalant comme l’était le foyer des Tattes il y a 6 ans, avec un dispositif anti-incendie défaillant, des portes coupe-feu qui s’ouvrent ou ne s’ouvrent pas, sans aucun plan clair d’évacuation des logements, des résident.es qu’on connaît peu et qu’on ne comprend pas toujours? Dans ce foyer, la panique a sans doute gagné autant les agents de sécurité que les résident.e.s. Ils ont abandonné leur «responsabilité» pour sauver leur peau, devenant ainsi des criminels», relève Viviane Luisier de Solidarité Tattes.
Pour l’association, l’État, l’Hospice général et la société de gardiennage auraient dû aussi être poursuivis. Les avocates de plusieurs plaignants ont fait appel devant la Chambre de recours contre l’ordonnance de classement et demandent que l’Hospice général et son responsable sécurité incendie soient poursuivis.
«Et aujourd’hui, où sont les sinistrés de cet incendie? Comment les retrouver pour leur présenter des excuses et des indemnisations? Pourquoi les autorités refusent toujours d’octroyer un permis à l’une des rares victimes toujours à Genève, Ayop Aziz – un jeune tchadien de 19 ans au moment des faits gravement blessé à la tête après une chute du troisième étage du foyer lors de l’incendie, ndlr?», conclut Viviane Luisier.