Droit d’initiative cantonal: un défaut à corriger

Jura • Le système concernant le vote d’une initiative et de son contre-projet ne permet pas forcément de connaître la volonté populaire. Un défaut qui ne persiste plus que dans quelques cantons.

Dans les années 70, lors de votations fédérales sur des initiatives populaires et leur contre-projet, il est arrivé deux fois qu’une petite minorité de double non l’emporte sur 80 à 85 % de votants qui se partageaient entre initiative et contre-projet. Il n’était pas possible de voter deux fois oui et un bulletin contenant un oui et une case blanche équivalait à oui et non. Lors de la création du nouveau canton, on a voulu remédier à cela, dix ans avant la Confédération, mais on n’a pas trouvé la bonne solution, puisqu’on a simplement prévu que le projet recueillant le plus grand nombre de voix était accepté.

Un exemple le 10 juin
Prenons l’exemple de la votation du 10 juin prochain (voir Gauchebdo, n° 20). Un citoyen favorable à l’initiative demandant des prestations complémentaires pour les familles, pourrait, par crainte d’un refus de l’initiative et pour qu’il y ait tout de même un progrès, voter aussi oui au contre-projet, qui prévoit une augmentation des subsides pour les primes d’assurance-maladie des familles à faibles revenus. Si ce raisonnement était partagé par de nombreuses personnes, leurs voix s’ajouteraient à celles des citoyens qui sont favorables au contre-projet. Le contre-projet pourrait ainsi l’emporter, même si la majorité des votants préférait l’initiative. C’est pourquoi le comité de soutien à l’initiative est obligé de recommander le non au contre-projet.

Si, au contraire, presque tous ceux qui acceptent l’initiative refusent le contre-projet et que ni l’une ni l’autre ne sont acceptés, mais représentent ensemble une forte majorité, ce serait comme au niveau fédéral autrefois, la petite minorité de double non qui l’emporterait.

Presque tous les cantons
Depuis l’entrée en souveraineté du canton du Jura, la Confédération et 21 cantons ont résolu le problème en introduisant la possibilité du double oui avec une question subsidiaire pour indiquer la préférence entre les deux projets.

Si on excepte les deux cantons où les initiatives sont traitées en lansgemeinde (GL, AI), seuls JU, NW et AG n’ont pas de question subsidiaire. Nidwald a un système semblable à celui du Jura, tandis qu’en Argovie, le double oui entraîne l’acceptation de l’initiative!

Dans le Jura, en 2002, une initiative parlementaire du POP a proposé d’introduire la question subsidiaire. Chrétiens-sociaux et socialistes l’ont soutenue, mais PDC, PLR et UDC l’ont refusée, sans aucune explication, se contentant d’écouter le mauvais argument du Gouvernement: c’est trop compliqué! Pourtant, ce système était en vigueur depuis quinze ans sur le plan fédéral, et lors du vote de 1987, les Jurassiens l’avaient accepté à 67,4 %. Enfin, c’est plus simple au niveau cantonal, car il n’y a pas de problème de double majorité (peuple-cantons).

Il serait temps que le Jura revoie son système pour que la volonté populaire puisse être exprimée clairement, grâce à la question subsidiaire. Mais, en attendant, le 10 juin, les partisans du progrès social doivent voter oui à l’initiative et non au contre-projet.