A la suite de la publication par l’Office fédéral de la statistique de chiffres montrant l’importance de la pauvreté en Suisse, notamment celle de nombreuses familles, le Parti chrétien-social indépendant a lancé une initiative populaire, rédigée en termes généraux, demandant l’introduction de prestations complémentaires pour les familles, selon un dispositif inspiré par les PC AVS/AI. L’initiative a été déposée en avril 2016. En novembre 2017, le Parlement l’a refusée par 34 voix (PDC, PLR, UDC) contre 25 (PCSI, PS, Verts et CS-POP) et a décidé de lui opposer un contre-projet consistant à renforcer les subsides pour les primes d’assurance-maladie.
L’objectif de ces PCFam est de couvrir la différence entre les besoins vitaux de la famille et ses revenus insuffisants. Ce système existe déjà dans quatre cantons (TI, VD, GE, SO) et a l’avantage de sortir les familles de l’aide sociale. Au Tessin, cela a diminué de 50 % les prestations de l’aide sociale, et dans le canton de Vaud, 1400 ménages ont pu sortir de l’aide sociale. Un autre avantage, par rapport au contre-projet, est que la prestation est versée sur la base de la situation effective de la famille au moment de la demande, tandis que pour les subsides à la caisse-maladie, il y a un décalage d’environ deux ans, puisque cela dépend de la décision de taxation.
Environ 1000 familles concernées
Selon un modèle basé sur les normes des PC AVS/AI réduites de 25 %, les PCFam toucheraient 990 familles représentant 2870 personnes. Cela coûterait environ 12,3 millions de prestations brutes. Il faut retrancher de ce chiffre les subsides déjà versés pour l’assurance-maladie et l’aide sociale. Le Gouvernement estime que l’on arriverait à un coût net de 4,5 à 6,5 millions de francs. A cela s’ajoutent des frais d’administration, sur lesquels Gouvernement et partisans de l’initiative ne sont pas d’accord, car ces derniers font remarquer que pour ces PC, il y a en général une décision annuelle, tandis que pour l’aide sociale, c’est une décision par mois, ce qui nécessite davantage de travail.
Les arguments du Gouvernement et des partis bourgeois contre l’initiative sont évidemment financiers. Pour eux, le coût (environ un demi-pourcent du budget cantonal) est trop élevé. C’est pourquoi ils ont proposé un contre-projet se limitant à renforcer les subsides pour les primes d’assurance-maladie. Selon le modèle étudié, le coût du contre-projet serait d’environ 2,2 millions de francs et cela toucherait 600 familles, soit environ 2000 personnes. Le subside supplémentaire pourrait atteindre 225 à 250 francs par mois et par famille, soit un montant nettement inférieur aux PCFam. Dans le canton de Vaud, en 2014, le montant moyen se situait entre 800 et 975 francs.
Caritas et les syndicats ont rejoint le PCSI et les partis de gauche dans le comité de soutien à l’initiative, qui recommande de refuser le contre-projet, car en cas de double oui, c’est le projet qui en obtient le plus qui est accepté. On pourrait donc avoir une majorité de votants favorable à l’initiative, mais un «refus» de celle-ci si le contre-projet recueillait plus de oui. Espérons que l’adage qui dit «le Jura élit à droite et vote à gauche» se vérifie une fois encore le 10 juin prochain.