La genèse du projet fait déjà partie de l’histoire. En prévision de la Cop 21 sur le climat qui s’est déroulée à Paris en 2015, un mouvement citoyen pour le climat et la justice sociale a bourgeonné en 2013 à Bayonne, où 12’000 personnes s’étaient retrouvées dans un premier village des alternatives au changement climatique, Alternatiba.
L’objectif était tout à la fois de dénoncer l’urgence climatique qui, cet été, a encore montré qu’elle n’était pas une vue de l’esprit, en mettant en place des alternatives concrètes autour des thématiques «qui font société». Ce qui implique une réorganisation de l’espace public aussi bien dans les domaines de l’économie que de la finance, de l’agriculture, de l’alimentation, des transports, de l’éducation ou de l’habitat. Décroissance? « Nous utilisons peu ce mot, mais il est clair qu’il faut décroître notre empreinte carbone, notamment en ce qui concerne les pratiques de production et les relations commerciales des entreprises », explique Antonin Calderon, socio-économiste et secrétaire général de Monnaie Léman, l’association gérant cette monnaie locale, qui participe à l’organisation de l’événement.
Réduire l’empreinte climatique
Pour réaliser leur programme, les activistes de la cause font souvent référence à la théorie de la transition écologique. Concept défendu par l’enseignant anglais en permaculture, Rob Hopkins, à travers des ouvrages comme Manuel de Transition: de la dépendance au pétrole à la résilience locale ou Le pouvoir d’agir ensemble, ici et maintenant, celui-ci cherche à orienter le développement dans une direction plus durable, par la participation de tous, en identifiant et en restructurant fondamentalement les systèmes insoutenables qui sous-tendent notre société.
Parmi les premiers problèmes identifiés, la prédominance toujours actuelle des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) dans l’économie et nos sociétés. Tout à la fois non renouvelables, inégalement réparties, tendanciellement de plus en plus chères, elles sont les premières causes du réchauffement climatique. Face à cette situation, il convient alors de réduire équitablement notre empreinte écologique. Ce qui passe par le concept de société à 2000 watts, qui postule une réduction par trois de notre consommation d’énergie et le remplacement de celle subsistante par des énergies renouvelables. «Il ne faut dépasser aucune des frontières écologiques de la biosphère, tout en assurant le respect des droits économiques, sociaux et culturels garantis internationalement comme le droit à l’alimentation au logement, à la santé ou la sécurité sociale. Il faut aussi assurer des conditions de travail favorables à l’épanouissement humain et respecter les conventions de base de l’Organisation mondiale du travail (OIT) à ce sujet», revendique la feuille de route pour la transition de la Chambre de l’économie sociale et solidaire (Après-GE), cheville ouvrière du rendez-vous alternatif genevois.
«Pas qu’un festival bobo»
«Tout comme Paris, Mulhouse, Toulouse ou Dakar, Genève est une des villes qui continuent à perpétuer ce rendez-vous annuel du mouvement citoyen pour le climat», explique Antonin Calderon. Pour ce membre du comité de l’épicerie participative sans emballages Le Nid, et de l’association Ithaque qui promeut l’habitat coopératif et communautaire, le festival Alternatiba, qui se tiendra cette année au Parc des Cropettes derrière la gare de Cornavin, doit servir de vitrine à la transition écologique et de lieu de synergies.
«Ce festival permet à un plus grand nombre de gens de se familiariser avec le modèle d’une société post-pétrole et post-spéculation, plus écologique et plus sociale», explique-t-il. Outre des films et conférences, le festival Alternatiba Léman proposera de nombreux stands, liés tant à l’agriculture de proximité avec notamment la Fédération romande d’agriculture contractuelle de proximité qu’à la mobilité douce, à l’éco-habitat qu’à la solidarité internationale ou aux alternatives numériques et aux médias alternatifs (dont Gauchebdo). Antonin Calderon récuse l’étiquette de festival bobo, soulignant que parmi les acteurs de l’économie sociale et solidaire et d’Après-Ge, on trouve beaucoup d’entreprises de biens et de services accessibles, et des organisations qui travaillent dans les domaines de la réinsertion, la précarité, le handicap, la solidarité internationale.
Une telle économie peut-elle essaimer dans un monde régi par les règles du capitalisme? Antonin Caderon y croit, rappelant qu’à l’échelle locale, celle des villes et des quartiers, de plus en plus de cités défendent une approche de transition écologique, notamment par la création d’éco-quartiers. Dans sa feuille de route, Après-Ge estime que le calendrier du passage de la situation actuelle de non-durabilité à celle de durabilité prendra deux décennies, voire trois. Il est temps que tout le monde s’y mette.
Informations complémentaires et programme sur www.alternatibaleman.ch