C’est en présence du compositeur que l’Ensemble contemporain de l’HEMU, dirigé par William Blank, compositeur lui aussi du reste, et le guitariste Luigi Attademo, remarquable musicien autant que virtuose, ont créé le concerto d’Alessandro Solbiati. Etrangement, ce compositeur milanais aujourd’hui âgé de 60 ans, connu et joué tant dans son pays qu’à Lisbonne, Boston ou Moscou, bref un peu partout dans le monde, est quasi ignoré en Suisse. La Société de Musique Contemporaine (SMC) de Lausanne a comblé cette lacune en présentant, lors de son dernier concert, deux pièces emblématiques de ce musicien qui ne se rattache à aucune école.
Un dialogue émouvant
«Je ne suis pas un révolutionnaire, expliquait-il en début de soirée; je cherche à retrouver un ordre hérité des générations précédentes, une narrativité de la musique, à donner forme à mon imaginatif.» Et pour cela, il explore toutes les possibilités de l’instrument ou de la voix, en en révélant des richesses insoupçonnées sans jamais les trahir. Ainsi So früh?, sept petites pièces pour soprano et ensemble, révèle le poète, lyrique, sensible, tandis que le concerto insiste sur un certain côté plus percussif de la guitare, dans une série d’épisodes dont l’orchestre, comme en résonance, reprend les formules, les amplifie, peu à peu s’impose. La guitare parle à nouveau et ce dialogue qui déroule une sorte de dramaturgie purement musicale se termine par le solo du début, émouvant dans son retour au silence.
Il est à espérer qu’on entendra d’autres œuvres du catalogue de Solbiati, riche de plus de deux cents pièces: oratorio, opéra, musique de chambre. Son goût pour la poésie se manifeste dans plusieurs recueils sur des textes de Rilke, Hölderlin, Beaudelaire, Stefan George, Dante… Solbiati enseigne aussi à Milan, Avignon, donne des cours de maître à Paris, Lyon, Mexico. Bref, on ne s’en étonne que plus d’avoir dû attendre cette saison pour le découvrir.
Une saison de la SMC riche en créations
Cette saison 2016-2017 de la SMC nous promet une autre création mondiale, lundi 5 décembre, à la salle Utopia I, rue de la Grotte 2, à 19h30. Il s’agira d’une pièce de Blaise Ubaldini pour trombone, troix voix, harpe, piano et trois percussionnistes, donnée dans le cadre d’une soirée Israël, Iran, où la musique de Perse sera mise en dialogue avec celle dont nous sommes coutumiers. Love song for a Lonterm Hatred, sur un texte de David Avidan (1934-1995), enfant terrible de la poésie hébraïque, mis en musique par Ubaldini est, nous dit-on, une ode aux contraires. Ce même soir on entendra en outre Vângâh du compositeur iranien Alireza Farhang, Dialogue 88 pour piano de Fozie Majd, et Compositions du trio Chemirani, un père et ses deux fils, qui dévoilent les possibilités infinies des percussions persanes. Les interprètes sont l’Ensemble Matka de Genève, L’Ensemble Romain Mayor et le Trio Chemirani. Une soirée à ne pas manquer certainement.
SMC, Utopia I , HEMU, rue de la Grotte 2, 19h30 le 5 décembre