«Il est clair que nous saluons et soutenons les actions de la justice du parquet de New York aux USA contre la FIFA et celle du Ministère public (MPC) en Suisse. Il est important de continuer à mettre l’organisation sous la pression de la justice et de l’opinion publique mondiale afin notamment d’améliorer les conditions inhumaines de travail sur les chantiers au Qatar», souligne Lionel Frei, porte-parole de l’œuvre d’entraide Solidar, qui, en 2014, avait envoyé 15’000 mails de protestation à Sepp Blatter pour dénoncer la mainmise des sponsors officiels sur la Coupe du monde au Brésil. Vendredi 29 mai, rebelote. Avec le soutien du syndicat Unia, l’association avait réuni plus de 200 activistes avant le Congrès de la FIFA pour manifester contre les conditions de vie et de travail régnant sur les chantiers au Qatar. Un cimetière symbolique avec 100 croix a été installé devant le Hallenstadion de Zurich. «Les participants au congrès ont ainsi eu l’occasion de se souvenir des misérables conditions de vie sur les chantiers de la Coupe du Monde 2022. Depuis le début des constructions, les droits humains et du travail y ont été systématiquement violés», rappelait Solidar. Deux ouvriers indiens ont déposé devant les tombes une couronne de fleurs et ont demandé à la FIFA une amélioration immédiate de la manière dont les travailleurs sont traités dans la péninsule arabique.
A la mi-mai, Solidar a aussi lancé une pétition en ligne pour que la FIFA adopte une Charte de responsabilité sociale. Celle-ci demande que l’aréopage du football mondial respecte des critères sociaux lors de l’attribution des Coupes du monde. Elle exige aussi que des mécanismes de sanction soient mis en place, que des visites tripartites (FIFA, maîtres d’ouvrage, représentants des travailleurs) garantissent le respect des droits du travail sur les chantiers et qu’en cas de graves violations des droits humains, le pays hôte puisse se voir retirer l’attribution de la Coupe du monde. Rien de moins. Pour l’heure, la pétition a été signée par près de 9’000 personnes. Quand elle aura atteint les 10’000 signatures, elle sera envoyée à la FIFA. Solidar propose aussi au public d’écrire aux sponsors pour faire pression sur l’instance mondiale du football afin qu’elle respecte des critères sociaux. «Avec le scandale actuel, la FIFA a tout intérêt à aller dans notre sens pour redorer son blason», estime Lionel Frei, qui précise aussi qu’en mars dernier, le parlement avait refusé une pétition lancée par son organisation, avec l’appui des Jeunes socialistes, qui demandait la suppression des privilèges fiscaux de la FIFA. L’œuvre d’entraide suisse n’est pas la seule à miser sur la pétition pour changer le cénacle footballistique. Sur le site en ligne Avaaz.org, une pétition internationale cartonnait ces dernières semaines, forte de près de 800’000 signatures. Son objectif proclamé: «Renvoyer Sepp Blatter aux vestiaires». Elle devait bientôt être adressée aux membres du Congrès et au Comité exécutif de la FIFA, mais le Haut-Valaisan, en démissionnant brusquement, aura finalement devancé les attentes des pétitionnaires. «L’organisation de Blatter a encouragé la corruption, la violation des droits des travailleurs partout dans le monde, parfois jusqu’à leur mort, et la destruction de communautés entières pour construire des stades», accuse le texte, qui se propose de faire «un ménage définitif» à la FIFA. Ces pétitions auront-elles un impact pour transformer de fond en comble l’organisation? Jusqu’à la démission surprise du président, on pouvait en douter, tant, par le passé, l’association s’était toujours arrangée pour passer entre les gouttes, sous couvert d’autocontrôle et de pseudo commission d’éthique pour mieux nettoyer le linge sale en famille. Tant et si bien que même les livres-enquête sur la corruption au sein de la FIFA de journalistes comme Andrew Jennings n’arrivaient pas à ébranler le trône du président et l’organisation, si grande était l’insubmersibilité d’un Sepp Blatter à la morgue débonnaire. Lors du Congrès de la FIFA, où il a encore été élu haut la main par les représentants de toutes les fédérations, à l’exception de celles de l’UEFA, au grand dam de Transparency international, l’indéboulonnable président s’était même fait un malin plaisir de répéter que l’enquête ouverte par le MPC faisait suite à une plainte déposée par la FIFA au mois de décembre. Ces rodomontades auront pourtant été de peu de poids face à la machinerie judiciaire étasunienne. En quelques jours, l’étau s’est resserré inéluctablement sur le président à vie. Dès le lundi, le New York Times annonçait que le FIB avait des preuves sérieuses que le secrétaire général de la FIFA, bras droit du roi, le Français Jérôme Valcke, avait versé dix millions d’euros à Jack Warner, vice-président de la FIFA, en trois virements dans le cadre de l’attribution du Mondial 2010 à l’Afrique du Sud. Des versements financiers faits à l’insu de Blatter? Difficile d’y croire. Sa position devenait de plus en plus intenable, au point de précipiter sa fin de règne.
La Suisse doit combattre la corruption
Pour la Suisse qui abrite le siège de la plus grande multinationale du sport au monde, il devient, dans tous les cas urgent de durcir sa loi sur la corruption et que ce fléau soit enfin considérée comme un délit aussi pour les associations sportives et punissable automatiquement et non seulement sur plainte. Il faut aussi que les lanceurs d’alerte soient protégés, estime le PS, qui a ouvert les hostilités sur ce sujet au Conseil des Etats cette semaine. Punir les tricheurs, prévaricateurs et autres corrompus devient une nécessité dans un pays qui abrite un nombre record de fédérations sportives