Les chefs de service et les simples enseignants ne sont pas traités à la même enseigne par le Conseil d’Etat.
L’Etat de Vaud a de plus en plus tendance à ne pas supporter l’idée de se séparer de ses chefs de service qui arrivent à la retraite. Ils se voient confiés de plus en plus souvent des mandats exceptionnels et renouvelés, voire des autorisations à poursuivre leur activité durant quelques mois « vu leur grande expérience », comme l’a relevé le président du Conseil d’Etat. Or, cette attitude débordante de reconnaissance ne paraît pas concerner les enseignants retraités et les besoins de l’école.
L’Ecole vaudoise traverse en effet une grave pénurie d’enseignants. La Haute Ecole pédagogique (HEP), prévue en 2001 pour accueillir 600 futurs enseignants, compte actuellement plus de 1’200 élèves et a dû modifier en conséquence quelques-unes de ses normes de formation. Mais cela ne suffit pas à combler le manque de maîtres. Dans un premier temps, le Conseil d’Etat a absolument refusé que des enseignants retraités reprennent du service. Toutefois, avec le souci de voir les écoliers vaudois disposer de maîtres formés, quelle que soit la pénurie, il est revenu quelque peu sur cette interdiction. Il a fini par reconnaître l’importance, pour la qualité de l’école, de limiter drastiquement l’engagement de remplaçants non formés. Il a donc accepté temporairement que des retraités de l’instruction publique reprennent l’enseignement jusqu’à l’âge de septante ans. Cette décision est sans doute bienvenue pour les élèves.
Petites retraites et gros sous
Mais le gouvernement y a mis une cautèle complexe à mettre en oeuvre : le salaire de ces retraités sera limité et ne devra pas dépasser, ajouté à la rente de la caisse de pension, le total de celui versé la dernière année d’activité de chacun de ces enseignants. La base de ce calcul compliqué concernera les seuls affiliés à la Caisse de pension de l’Etat.
Cela touche des maîtres et des maîtresses qui travaillèrent à temps partiel, d’autres qui disposent d’une maigre rente faute d’avoir eu une carrière ininterrompue. L’administration déjà très chargée pourrait y perdre son latin et les enseignants prêts à reprendre du service se voir découragés. En outre, cette limitation des salaires calculée sur un an diminuera la durée autorisée pour un remplacement dit de longue durée, comme pour un congé maternité suivi d’un congé d’allaitement par exemple ou pour quelques mois d’un congé sabbatique ou de formation. Plusieurs députés s’en sont émus.
Mais le Conseil d’Etat reste inflexible et imperturbable. Il répond à ceux qui osent y voir une différence de traitement par rapport aux chefs de service retraités : « Les chefs de service ont des compétences précieuses qu’il faudrait payer plus cher si l’on s’adressait aux privés pour y recourir. » Dixit Pascal Broulis lui-même.
Autrement dit, comme il n’y a pas de concurrence pour les enseignants, l’Etat n’a pas besoin de faire croire que ce sont les compétences de ses serviteurs qui comptent dans son appréciation. Il ne s’agit que d’une question de gros sous. L’avenir des nombreux chefs de service retraités et « chargés de mission » reste durablement assuré.