Le patronat refuse les PC Familles et la rente-pont.
Elle est à la fois cachée, taboue et honteuse : la pauvreté existe en Suisse. Lorsque Caritas avait, en 2005 déjà, annoncé qu’une personne sur dix était en situation de pauvreté en Suisse, il s’était trouvé des gens, à droite, pour crier à la manipulation de chiffres. L’Office fédéral de la statistique vient de publier une enquête sur les revenus et les conditions de vie en Suisse qui confirme ce constat : en 2009, 6,7% de la population vivant en Suisse se trouvait en situation de « privation matérielle », comprenez de grande pauvreté. Dans le canton de Vaud, 10% de la population en âge de travailler dispose d’un revenu mensuel inférieur au seuil de pauvreté, et 4’000 familles touchent le revenu d’insertion (RI).
La pauvreté en Suisse est d’autant plus scandaleuse qu’elle se développe sur fond d’accroissement des inégalités : le fossé séparant les pauvres des riches se creuse (ou plutôt continue d’être creusé par des politiques de redistribution du bas vers le haut), tandis que les salaires des dirigeants de l’industrie reprennent l’ascenseur et que les bonus versés à nouveau dans la finance font passer les rémunérations d’avant la crise pour une poignée d’argent de poche.
Face à cela, des mesures ont été adoptées par le Grand Conseil vaudois, sous la forme de Prestations complémentaires (PC) Familles et d’une rente-pont AVS. Les PC Familles s’adressent aux familles pauvres qui travaillent (« working poors ») et viennent compléter les ressources jusqu’au seuil des besoins vitaux (selon le barème des PC AVS/AI) pour les foyers avec au moins un enfant entre 0 et 6 ans. Pour les familles avec un ou plusieurs enfants de plus de 6 ans, les PC Familles permettent de couvrir les besoins vitaux des enfants. Ce régime, qui ne concerne que les familles avec un revenu salarial, permettrait de faire sortir 900 familles du RI.
On connaît les difficultés à retrouver un emploi à partir d’un certain âge : considérés comme peu productifs, les demandeurs d’emplois de plus de 50 ans traversent souvent un véritable parcours du combattant, à l’issue incertaine. La rente-pont AVS concerne les chômeurs dès 62 ans pour les femmes, 63 ans pour les hommes : ces personnes en fin de droit et ne disposant pas de fortune personnelle, dont les chances de retrouver un emploi sont très faibles, pourraient atteindre l’âge de la retraite dans la dignité, sans épuiser leur deuxième pilier. Ce régime concerne 700 personnes dans le canton.
Ce projet permet à 1’000 ménages vaudois de sortir de l’assistance. Il implique des dépenses de l’ordre de 26,3 millions, financés à hauteur de 60% par l’Etat et les communes, le reste étant couvert par couvert par une cotisation paritaire de 0,06% payée par les employeurs, les indépendants et les salariés.
Préférant nier le problème, le patronat et ses relais de droite ont lancé un référendum contre ces mesures. Le POP & Gauche en mouvement, avec l’ensemble de la gauche, de nombreuses associations et une partie du centre droite, s’engage d’ores et déjà pour l’acceptation de ce projet juste et équilibré. Nous ne pouvons pas accepter de laisser une partie de la population vaudoise sur le bord du chemin : il en va de la solidarité cantonale comme de la dignité des personnes concernées.