Nyon. Cité-dortoir ? Ville de festivals ? Ou encore ancienne colonie romaine ? Connue pour être un peu des trois sûrement, mais pas seulement. Si on monte la Route de Saint Cergue, route qui mène jusqu’à la plaine de l’Asse qui abrite chaque année la Mecque des festivaliers de la région, on arrive rapidement à une maison, plutôt banale vue de l’extérieur. Le jardin est quelque peu feuillu admettons, et le portail bringuebalant, mais en somme, on ne se trouve pas face à un vieux bâtiment délaissé de la RDA : c’est la MAP, la Maison alternative des Plantaz.
C’était en novembre de l’année passée que quelques squatters ont investi les lieux ; à l’époque une vieille maison vouée à la démolition. Au départ donc ce fut un squat, mais les plaintes ont rapidement fusé de la part du voisinage, obligeant les occupants à prendre les choses en main. Accusés de tapage nocturne et de faire du quartier un lieu de fréquentation douteux, les squatters de l’époque ont donc écrit à la commune pour tenter d’instaurer un dialogue. Leur démarche a été fructueuse et, soutenue par le syndic Daniel Rossellat, ils ont obtenu un contrat de bail jusqu’en décembre 2010. Depuis, leur contrat a été rallongé pour un an de plus – plutôt positif dans une région ou la simple location d’un studio relève du défi.
« Au départ, c’était surtout pour protester contre la politique du logement dans la région », explique Cédric, ébéniste. Pour montrer que d’autres solutions quant à l’occupation de lieux abandonnés sont possibles, mais au fur et à mesure d’autres idées se sont développées : « Le but serait qu’à la longue la MAP jouisse d’un statut d’association », poursuit Cédric. En effet, pour l’instant toutes les soirées qui ont lieu sont encore à titre privé – c’est-à-dire qu’elles ne bénéficient d’aucune publicité et que les « festoyeurs » qui viennent ont été « invités » même si c’est par le biais d’un flyer. Le statut d’association leur permettrait de développer des projets tels que les expositions de BD, les concerts et les projections de films qui ont déjà vu le jour de manière discrète.
Ouvert à tout le monde
« Un lieu alternatif doit avant tout être ouvert et accessible à tout le monde ! », martèle un autre habitant de la maison. « Les autres lieux culturels sont souvent chers et ferment tôt ». A la MAP plusieurs initiatives ont déjà vu le jour. En mai dernier, la première journée portes ouvertes a permis de montrer au grand jour les intentions et l’état d’esprit des occupants. « Lors de ces journées, un gars qui avait signé la pétition contre nous, nous a avoué qu’il pensait qu’on était tous au social », déclare Cédric. Le stéréotype du squatter au chômage ne vaut effectivement pour aucun habitant. Etudiante aux Beaux-arts, apprenti logisticien à la Croix Rouge, travailleur social ou ébéniste, les provenances professionnelles sont diverses. Lors des portes ouvertes, le réalisateur de courts-métrages, Claude Barras, a d’ailleurs présenté son travail et une démonstration de sérigraphie a aussi ponctué l’événement.
D’autres projets sont en cours de réalisation comme une série de films d’horreurs, au rythme d’une projection par mois, et des concerts. Cependant le groupe veut vraiment pouvoir se présenter comme association au plus vite possible pour éviter tout désagrément avec les autorités. « En général, on n’a pas trop de pression de la part des politiques, mais on a un bon contact avec le syndic », précisent-ils. Ils se gardent le droit de refuser à leurs soirées toute personne susceptible de nuire au bien-être du quartier et des autres en général. « Le squat de la Morâche (ndlr : un ancien squat à proximité du gymnase de Nyon) avait dégénéré, tout le monde pouvait y entrer et il y avait trop de drogues. Nous, on ne veut pas de ça. On est cinq à occuper officiellement les lieux et à se partager le loyer. Bien sûr il y a souvent d’autres personnes, mais celles-ci sont de passage et chacune sous la responsabilité d’un des principaux gérants », ajoutent-ils.
En somme, la MAP est un lieu alternatif en devenir et il est bon de voir qu’en dehors des grandes villes où la grogne monte, d’autres projets et petits lieux de résistance voient le jour.