Les chavistes tendent la main

Venezuela • Le Parti socialiste unifié du Venezuela remporte 20 des 23 régions en jeu, mais appelle les élus de l’opposition à faire un pas vers la réconciliation. (Par Lina Sankari, Guatire, Caracas (Venezuela), envoyée spéciale, Paru dans L’Humanité)

Le PSUV a remporté 20 des 23 régions lors des élections. (Partido Socialista Unido de Venezuela)

Bien avant l’annonce des résultats, la fierté était palpable. Malgré le caractère régional et local des élections de dimanche, les 29es en vingt-deux ans de révolution bolivarienne, les Vénézuéliens avaient conscience du caractère historique de ce scrutin pour la réconciliation nationale. En dépit des ingérences étrangères, un blocus et des sanctions qui frappent durement, le pays avait également la souveraineté au cœur. Au lycée Andres-Bello de Caracas, Elena, 64 ans, pointe le doigt en l’air: «Nous sommes un pays fort, valeureux, en avant! Nous montrerons au monde que nous avançons pour la paix et que ce n’est pas le gouvernement qui décide mais, nous, le peuple!», explique cette retraitée, qui fustige le jeu des «contre-révolutionnaires» avant d’être tirée par le bras par sa petite-fille.

Le PSUV en position de force  pour évoquer l’avenir

Pour la première fois depuis 2017, l’ensemble de l’opposition revenait dans le jeu électoral, rompant ainsi avec la stratégie insurrectionnelle. Las, profondément divisée, la droite, qui a travaillé à sa reconstruction avant la présidentielle de 2024, emporte seulement 3 des 23 Etats (Cojedes, l’île de Nueva Esparta et la région pétrolifère et peuplée de Zulia), soit un de moins qu’aux dernières régionales. Une victoire écrasante pour le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) au pouvoir, en position de force pour évoquer l’avenir. «Je réitère mon appel aux candidats élus de l’opposition à avancer dans le dialogue politique et la réunification nationale. Je vous tends la main, pour travailler ensemble, avec bonne volonté et foi, et construire la nouvelle prospérité du peuple», a lancé le président Nicolas Maduro aux représentants de la Table de l’unité démocratique (MUD). Avec 41,80%, la participation est supérieure à celle des dernières législatives de 2020 (31%), boycottées par une partie des conservateurs, mais en deçà des régionales de 2017 (61,03%).

Un scrutin qui s’est déroulé dans un climat apaisé
Autre force du pouvoir pour la suite: le climat apaisé qui a régné durant tout le scrutin. «Tenir des élections de cette nature est un défi. Lors des dernières législatives, un entrepôt où étaient stockées des machines de vote avait été incendié. Plusieurs années de travail sont parties en fumée mais, aujourd’hui, nos machines sont de technologie 100% vénézuélienne», insiste Rebecca Ramos, responsable du Conseil national électoral de l’Etat de Miranda (Nord). Cette fois, «l’opération République» confiait aux forces armées la protection des bureaux et la sauvegarde du matériel électoral.

A Guatire, les électeurs pointent eux aussi la nécessité de tourner la page de la polarisation et de la crise. Venu en famille au bureau de vote, Douglas discute avec des amis dans la cour de l’école maternelle. Il espère que le «vainqueur, quel qu’il soit, améliore la vie des pauvres». Partisan de la droite, Luis n’a jamais cessé de voter et se réjouit de voir son camp en finir avec «un cycle (d’abstention, ndlr) qui n’a pas fonctionné». En fin d’après-midi, l’opposant historique Henrique Capriles, qui déplorait le manque d’unité de la droite, jetait toutefois le doute sur la probité du scrutin en exhortant les autorités à clôturer les bureaux tenus, selon la loi, de fermer seulement lorsqu’aucun électeur ne s’y présente plus. De retour pour une mission d’observation pour la première fois depuis quinze ans, l’Union européenne rendra son rapport cette semaine. Le Venezuela n’a pas attendu pour voir dans ces élections un approfondissement de la démocratie et évoquer un retour au dialogue.

 

Un deuxième tous est prévu au Chili

Il y aura un second tour pour les présidentielles chIliennes. Le multimillionnaire et proche du président brésilien, Jair Bolsonare , fils d’un officier de la Wehrmacht exilé allemand au Chili après la deuxième guerre mondiale, José Antonio Kast, 55 ans, arrive en tête du premier tour du scrutin avec 27,91% des voix. Il est talonné par le candidat de gauche Gabriel Boric (25,83 %), un ancien leader étudiant qui portait les couleurs de la coalition Apruebo Dignidad réunissant, entre autres, le Frente Amplio et le Parti communiste chilien. Suivent la candidate de la Démocratie chrétienne soutenue par le Parti socialiste, Yasna Provoste (11,61 %) et, à droite, Sebastian Sichel (12,79 %), séide du président sortant, Sebastian Piñera, mis à mal par les révélations sur ses pratiques d’évasion fiscale révélée par les Pandora’s papers. A gauche, le progressiste Marco Enriquez-Ominami et le candidat d’extrême gauche Eduardo Artés totalisent 9%.

Les forces progressistes pourront-elles refaire leur retard au 2ème tour? Tel est l’enjeu du scrutin, marqué par un taux de participation de 47,34 %, et une forte abstention dans les districts ouvriers du pays ou dans les communauté du peuple autochtone des Mapuche. «Les élections parlementaires pour les sénateurs et les députés ont également vu une consolidation des positions conservatrices. Sur les 50 postes parlementaires que compte la chambre du Sénat, la droite (Podemos Más et Frente Social Cristiano) a obtenu 25 représentants, auxquels il faut ajouter les membres de la Démocratie chrétienne (5). Dans le cas de la Chambre des députés, les secteurs conservateurs ont obtenu une très bonne représentation», précise sur Jacobinlat.com, Igor Goicovic Donoso, professeur d’histoire à l’université du Chili (USACH).

JDr