L’époque des Celtes s’étend sur presque tout le Ier millénaire avant notre ère. Il s’agit d’un ensemble de peuples répartis sur un territoire allant des îles britanniques à l’Est européen. Même s’ils avaient atteint un haut degré de civilisation, tant sur les plans technologique, économique que social, ils n’avaient pas d’écriture. On connaît donc mal la plupart de leurs coutumes. Ils maîtrisaient bien la sidérurgie. C’est pourquoi on parle à leur propos d’âge du fer.
Celui-ci connut deux phases, qui ont pris le nom de deux sites majeurs: l’époque de Hallstatt (vers 700/500), et celle de La Tène (de 500 à la conquête romaine au Ier siècle av. J.-C.) C’est La Tène, sur les bords du lac de Neuchâtel, qui a donné son nom au Laténium. Il faut savoir que de nombreuses découvertes archéologiques ont pu être faites grâce aux corrections des eaux du Jura (1869-1891), qui ont abaissé le niveau des lacs de Neuchâtel et de Bienne. On appelle aussi cet âge du fer Protohistoire, période intermédiaire entre la Préhistoire et l’Histoire, liée à l’écriture.
Que nous montre l’exposition «Celtes – Un millénaire d’images» du Laténium, parc et musée d’archéologie situé à Hauterive, à quelques kilomètres de Neuchâtel en direction de Bienne? Il s’agit surtout de pièces de petite taille, réalisées en bronze ou en céramique, par- fois en or. Les Celtes ne cherchaient pas à réaliser des «œuvres d’art» au sens moderne du terme.
Leurs créations «artistiques» étaient liées à des aspects religieux, rituels, magiques ou sociaux, dont malheureusement nous ne possédons pas les clefs. Cela dit, elles sont d’une grande beauté esthétique. Au contraire de l’art gréco-romain, beaucoup plus réaliste, les Celtes aimaient le fantastique, le merveilleux, ils laissaient une large place à leur imagination. Leur figuration est souvent animale: cerfs, sangliers, têtes de taureaux. La figure humaine apparaît aussi: ainsi cette pièce en argent entourée de têtes, qui représentent peut-être les têtes coupées des ennemis, que l’on suspendait en guise de trophées.
On verra aussi de magnifiques torques en or: ce sont de grands anneaux sou- vent retrouvés dans des dépôts rituels. Les Celtes n’étaient pas isolés du reste du monde. Ils entretenaient d’importantes relations commerciales avec d’autres peuples. Leur art s’est donc aussi inspiré de motifs orientaux ou romains. En résumé, c’est à une belle découverte que nous convie cette exposition temporaire.
On en profitera pour faire le tour de la collection permanente, qui nous mène jusqu’au Moyen Âge. Il ne faut pas manquer de se balader ensuite dans le parc du Laténium, sur les bords du lac de Neuchâtel. On y verra notamment les reconstitutions de maisons, dont un petit village datant d’il y a 6000 ans. La dendrochronologie nous apprend que les arbres nécessaires à leur construction ont été coupés entre 3810 et 3790 avant notre ère. Une autre maison se réfère au mythe national des soi-disant «lacustres», qui en fait construisaient leurs maisons sur les berges et non dans l’eau. Bâties sur pilotis, celles-ci devaient résister aux crues du lac.
Un des rares dolmens de Suisse (c’est-à-dire une sépulture de l’époque néolithique) a été découvert en 1876 entre Auvernier et Colombier et déplacé dans le parc du Laténium. Celui-ci abrite aussi un menhir de 4,5 tonnes de granit érigé il y a plus de 6000 ans. Mais à quoi servait-il? Concernait-il un homme ou un dieu? Le mystère demeure, et c’est aussi cette part de mystère qui nous fascine dans la civilisation celtique. Après la conquête romaine par Jules César, il y eut un phénomène d’acculturation: les Celtes adoptèrent la langue latine (c’est pourquoi nous parlons le français), l’habitat, le système social et les mœurs du conquérant. Ils conservèrent cependant un certain nombre d’aspects de leur monde disparu, qui se fondirent avec ceux des Romains: ce qu’on appelle la civilisation gallo- romaine. L’exposition permet donc de découvrir un monde méconnu et resté en partie énigmatique.
«Celtes. Un millénaire d’images», Hauterive (NE), jusqu’au 10 janvier 2021.