Maya Angelou (de son vrai nom Marguerite Johnson) est née en 1928 à Saint- Louis, dans le Missouri, un État raciste du Sud. Ses parents, pauvres, l’envoient vivre chez sa grand-mère en Arkansas, autre État où sévit la ségrégation. Puis elle travaille en Californie. Elle suit un militant sud-africain en Egypte et s’installe ensuite au Ghana avec son fils Guy. Elle travaille avec Malcolm X jusqu’à son assassinat en 1965. Disciple de Martin Luther King, elle coordonne son action à New York. Dès 1981, elle vit en Caroline du Sud où elle enseigne à l’université. Elle prend part à la campagne présidentielle de Barack Obama. Elle est décédée en 2014.
Figure importante du mouvement étasunien des droits civiques, elle fut également l’auteure de poèmes et d’un cycle de récits autobiographiques. Rassemblez-vous en mon nom, paru en français en 1990, vient d’être réédité. Ce livre raconte la jeunesse de Maya, et notamment l’épisode californien de sa vie. On est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, époque «bénie» pour les Noirs américains qui «avaient souvent gagné plus d’argent en un mois qu’ils n’en avaient vu de leur vie entière». Mais dès la victoire, la ségrégation raciale reprend ses droits. L’auteure raconte quelques scènes de racisme ordinaire, ainsi que l’apprentissage de la vie d’une jeune mère célibataire «de couleur» dans le Sud profond. Puis elle gagne la Californie.
Là, elle est d’abord tenancière de bordel à distance, cuisinière et danseuse. Revenue en Arkansas auprès de sa Momma, elle évoque cette belle figure pour qui «le Christ et l’Église demeuraient les piliers de sa vie». Maya Angelou nous fait pénétrer dans cette société noire du Sud, avec ses valeurs morales et religieuses. Elle montre la profonde défiance mutuelle entre Noirs et Blancs. Elle n’idéalise cependant pas la communauté noire. C’est aussi une société brutale où les maquereaux exploitent les filles. La drogue y est très répandue. Maya tente de se faire engager dans le personnel féminin de l’armée des États-Unis. Mais elle est considérée comme «communiste» car elle a fréquenté une Labor School en Californie, et sa demande est rejetée. On est alors en pleine époque maccarthyste. Parmi les épisodes de cette vie mouvementée, il y a celui où elle tombe sur un escroc au mariage qui séduit la midinette qu’elle est encore…
Le livre se présente donc comme un Bildungsroman (roman de formation), qui utilise un langage assez cru, correspondant bien à la société violente dans laquelle elle vit, et dont les matchs de boxe sont comme une image emblématique. En même temps, Maya Angelou nous raconte ses lectures passionnées de Dostoïevski et Gorki. En elle, une écrivaine de talent est en train de naître.
Maya Angelou, Rassemblez-vous en mon nom, Ed. Noir sur Blanc, 2020, 267 p.