Timide loi sur le CO2

Il faut le dire • Le Conseil national, dans sa large majorité, a finalement accepté la loi sur le CO2, après son rejet par l’ancien parlement fin 2018

Le Conseil national, dans sa large majorité, a finalement accepté la loi sur le CO2, après son rejet par l’ancien parlement fin 2018. Cette législation doit permettre à la Suisse de concrétiser ses engagements et objectifs contre le réchauffement climatique, dans le cadre de l’Accord de Paris signé en 2015. Or elle ne parvient pas à atteindre le projet zéro émissions nettes de CO2 d’ici 2050. C’est un vrai compromis de politiciens.

Ainsi le texte voté manque de souffle, d’ambition. Il ne va pas assez loin ni vite face à l’urgence climatique. Et plusieurs tentatives de rétablir la justice climatique ont été écartées lors des débats. Certes, un fond de la transition écologique est instauré. Il pourra financer des mesures d’assainissement des bâtiments, le soutien aux énergies renouvelables, la protection contre les dégâts climatiques et le remplacement des chauffages à mazout ou électriques. Il sera mieux doté qu’actuellement. Mais c’est la poursuite de la politique actuelle, qui a montré ses faiblesses.

Ce qui est plus discutable encore, c’est le financement prévu. Soit une taxe sur les billets d’avion, une taxe de 10-12 centimes sur l’essence, pour compenser le fait que les importateurs proposent des voitures qui continuent à émettre plus de 95 grammes de CO2 par km, une majoration de la taxe sur le mazout. Celle-ci sera abolie pour «les entreprises prenant spontanément des engagements pour réduire leurs émissions de CO2».

Disons d’emblée que si ces taxes permettent d’augmenter la masse fiscale, elles ne sont pas incitatives et guère dissuasives. Prétendre qu’elles redonneront vie aux trains de nuit et favoriseront le fret ferroviaire tient de la pure illusion. De plus, une partie de l’argent provenant de ces taxes sera redistribuée à la population via une réduction des primes maladies et pour financer les caisses de compensations AVS. C’est bien, parce que les primes sont trop élevées et l’AVS doit être financée. Mais on retire de l’argent de la transition écologique pour diminuer l’impact de la loi sur les classes populaires et moyennes.

La Suisse rejette annuellement dans l’atmosphère 46,4 millions de tonnes d’équivalents-CO2 (non inclus le transport aérien et maritime international). Or, la loi n’aborde pas le transport maritime ou l’aviation qui ne paient pas de taxes sur le combustible. Ils participent néanmoins grandement au réchauffement climatique. Et la loi ne propose pas d’augmenter la progressivité de l’impôt. C’est pourtant la seule manière fiscale qui soit juste. Elle permet ainsi de mener des politiques publiques ambitieuses, comme l’exigent les crises sanitaires et écologiques que nous affrontons.