Le peuple suisse a accepté assez largement, le 14 juin 2015, un changement de la Constitution visant à autoriser le Diagnostic préimplantatoire (DPI). Restait à transposer le changement dans la loi d’application (la LPMA). Le parlement a proposé un projet contre lequel un référendum populaire a été lancé et a abouti. C’est pour cette raison que la population suisse devra se prononcer le 5 juin. Les opposants, dont des associations de défense des handicapés, craignent en particulier la possibilité de faire un screening chromosomique avant implantation de l’embryon, ce qui permet de faire un diagnostic prénatal (y compris de la trisomie 21), procédure qui est de toute façon acceptée à la 12ème semaine de grossesse.
Un couple sur six en moyenne souffre d’une stérilité «naturelle».
La procréation médicalement assistée (dont fait partie la fécondation in vitro –FIV) permet à ces couples, s’ils le désirent, d’avoir malgré tout des enfants dans la plupart des cas. Et si on peut et doit se poser la question sur le pourquoi de ce taux élevé de stérilité, on doit aussi permettre aux couples «victimes» de stérilité d’avoir recours à la PMA et si nécessaire à la FIV. Ce principe est déjà accepté, mais la LPMA actuelle (qui date de 2001, et dont la révision est l’objet de la votation), limite l’implantation à 3 embryons, partant du principe qu’il n’est pas raisonnable d’en implanter plus pour ne pas risquer que la mère porte plus de 3 enfants. Or en moyenne, il faut six ovules pour développer un unique fœtus viable, comme c’est le cas lors d’une grossesse naturelle. Un nouveau plafond de 12, associé à l’autorisation de conserver les embryons surnuméraires, permettra d’effectuer un DPI au jour 5 du développement embryonnaire, avec une chance réaliste de trouver un embryon non porteur d’une maladie génétique. Si plus d’un embryon n’est pas porteur de maladie, la nouvelle loi permettra alors de le cryo-conserver en vue d’une seconde chance. La durée maximale de conservation est fixée à dix ans. Il faut savoir qu’une grande partie des embryons inaptes à se développer dégénère naturellement dès un stade très précoce: entre le jour 1 et le jour 5. Il sera donc beaucoup plus facile de déterminer au jour 5 l’embryon qui a le plus grand potentiel de développement sur les 12 embryons maximum (et celui qui ne porte pas de maladie génétique). On pourra alors en implanter un et cela diminuera le risque lié à une grossesse multiple avec des risques importants de complications maternelles et d’accouchement prématuré. C’est ce qui est observé dans les pays européens qui ont accepté des législations analogues à celle proposée aujourd’hui au peuple suisse. Actuellement, le DPI n’étant pas autorisé, la plupart des couples font une analyse du fœtus (qui est parfaitement légale) à 11 ou 12 semaines de grossesse, qui permet de révéler ou non l’existence d’une maladie génétique. Cette analyse est malheureusement grevée d’un risque relativement important de fausse-couche, et si une maladie génétique est avérée, c’est un grand trouble émotionnel pour le couple confronté à la décision ou non d’une interruption de la grossesse. Précisons en outre que cette modification de la LPMA est approuvée par la Commission nationale d’éthique et correspond à ce qui se passe actuellement dans la plupart des pays européens.
Une utilisation limitée
Par ailleurs, il faut savoir que pour les couples qui n’ont pas d’autres choix pour fonder une famille que d’avoir recours à une PMA –et en particulier à la FIV- c’est un véritable parcours du combattant qui, s’il donne naissance à un enfant sain, est une joie qui permet heureusement d’oublier les difficultés antérieures. On y a recours parce qu’on n’a pas d’autres moyens et pas pour savoir le sexe de son enfant! Parler d’enfant OGM ou d’eugénisme est absurde et malveillant pour les couples qui doivent recourir à une FIV. Cette loi n’est d’ailleurs faite que pour les couples qui ont un risque connu de transmettre une maladie congénitale grave, et pour ceux qui sont victimes d’une stérilité, qui persiste malgré toutes les tentatives autres d’induire une grossesse. Finalement, notons que cela concerne moins de 2% des quelque 85’000 enfants qui naissent chaque année en Suisse. Le DPI est une possibilité offerte aux couples (mais qui a son coût). Accepter le référendum, c’est aussi se poser en censeur d’un aspect de la vie qui est éminemment personnel et intime